Reconquête! : de la victoire à l’explosion, quel avenir pour le parti ?
- Paul-Lionel Quiviger
- 15 juin 2024
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 16 mars

Fondé en 2021 par Eric Zemmour, Reconquête! est au bord du précipice. 48 heures après la (modeste) victoire de Marion Maréchal aux élections européennes, le parti implose. Conflits internes, désaccord stratégique et machiavélisme politique : analyse d’une explosion façon puzzle.
Le score de 5,47 % réalisé par la liste Reconquête! lors des élections européennes, a permis à Marion Maréchal, Guillaume Peltier, Sarah Knafo, Nicolas Bay et Laurence Trochu de devenir eurodéputés. Dans la foulée de la première victoire électorale du parti, les guerres intérieures ont poussé Eric Zemmour à exclure quatre de ses eurodéputés, sauf Sarah Knafo, sa compagne et conseillère.
En interne, tout le monde le savait. Eric Zemmour et Marion Maréchal ne s’entendaient pas. Mais le président de Reconquête! n’a eu de cesse de rappeler à la presse que les conflits intérieurs des partis n’intéressaient pas les électeurs. Pourtant, tous les projecteurs sont braqués sur Reconquête depuis que Marion Maréchal, Guillaume Peltier, Nicolas Bay et Laurence Trochu – présidente d’un mouvement allié de Reconquête – ont été exclus du parti.
Une note rédigée par Damien Rieu – lanceur d’alertes et directeur de la communication de Marion Maréchal – revient en détail sur les conflits successifs qui ont provoqué ce divorce. L’on peut lire dans ce document que Reconquête! aurait refusé de financer une partie de la campagne de Marion Maréchal, fait fuiter dans la presse des informations afin de la déstabiliser et même entreprit un Marion bashing pour qu’elle baisse dans les sondages. Tout cela dans l’objectif qu’une défaite aux élections européennes pousse - naturellement - la nièce de Marine le Pen vers la sortie du parti le plus conservateur de France. En interne, Sarah Knafo et Eric Zemmour se préparent déjà pour les élections présidentielles de 2027 et voyaient Marion Maréchal comme une menace tant les désaccords étaient nombreux.
Attaquer ou s’allier, le grand désaccord sur le Rassemblement national
Durant cette campagne, j’ai su faire la différence entre mes adversaires et mes concurrents a déclaré Marion Maréchal le soir de la victoire de sa liste aux européennes. Derrière elle, sur l’estrade, Eric Zemmour s’est contenté d’une moue en guise de désapprobation.
Durant cette campagne, la stratégie de Reconquête! sur le Rassemblement national a été un grand point de désaccord et une raison parmi tant d’autres du divorce entre Marion Maréchal et Eric Zemmour. L’une, est la nièce de Marine le Pen et refuse de taper sur le Rassemblement national (hégémonique à droite, 32 % aux élections européennes) en vue d’une union lors des prochains scrutins. L’autre, préfère se distinguer en campagne du parti à la flamme en multipliant les vindictes contre Marine le Pen, Jordan Bardella, leur programme et stratégie, mais prône l’union en fonction du type d’élection. Deux stratégies, deux personnalités politiques, un parti, un divorce, résume un militant du parti après l’exclusion de Marion Maréchal et de ses alliés.
Législatives anticipées : mais qui aura raison ?
Dans la soirée du 9 juin après l’annonce des résultats des élections européennes, Emmanuel Macron a décidé de dissoudre l’Assemblée nationale. Les élections législatives anticipées auront lieu le 30 juin, pour le premier tour, et le 7 juillet pour le second. Peu de temps avant son exclusion de Reconquête!, Marion Maréchal avait fustigé la décision d’Eric Zemmour de présenter des candidats de son parti face à une coalition de circonstances entre le Rassemblement national et Eric Ciotti, ancien président des Républicains.
Depuis son exclusion de Reconquête!, la nièce de Marine le Pen a négocié des circonscriptions avec le Rassemblement national. Accord qui était impossible pour le parti de Jordan Bardella lorsqu’elle était encore chez Eric Zemmour. Le parti à la flamme avait refusé de sceller une quelconque alliance avec l'ancien journaliste du Figaro et Sarah Knafo qui ont la même position stratégique concernant le RN.
L’exclusion des quatre eurodéputés unionistes a permis de faciliter les échanges en vue d’une probable coalition généralisée lors des prochaines législatives. De son côté, Eric Zemmour va présenter des candidats qui défendront les couleurs de son parti, mais se dit ouvert aux négociations avec le Rassemblement national. Trop tard pour certains militants de droite déçus par Reconquête!.
Machiavélisme
Le grand gagnant de cette tempête politique n’est nul autre que le Rassemblement national. Hégémonique à droite, le parti de Jordan Bardella a décimé Reconquête! après que l’échec des négociations entre les deux formations ont poussé le clan Zemmour à exclure la tribu Marion. L’explosion façon puzzle a fait orphelins de nombreux militants et sympathisants de Reconquête!. En 2021, le parti d’Eric Zemmour avait fait la promesse de l’union des droites. Aujourd’hui, il est considéré comme un frein à ce projet. Et il n’est pas impossible qu’une écrasante majorité des (actuels ?) fidèles d’Eric Zemmour vote, dès le premier tour, pour un candidat soutenu par le Rassemblement national, les séparatistes Républicains et Marion Maréchal.
L’union des droites qui se profile est en train de se faire sans Reconquête! qui peinera à reconquérir les 7 % d’électeurs qui avaient fait le choix d’Eric Zemmour lors des présidentielles de 2022.
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